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Transition écologique : 12 projets où l'IA change la donne
Pourquoi l’intelligence artificielle s’est-elle imposée comme une alliée de choix face à l’intensification des bouleversements climatiques et écologiques ? La réponse à travers 12 projets, allant de la connaissance de l'environnement à l'agriculture en passant par la forêt ou l'urbanisme, qui comptent sur l’IA pour fiabiliser et accélérer considérablement la production des données d'observation des territoires.
Publié le 25 septembre 2024
Temps de lecture : 10 minutes
Connaissance et suivi de l'environnement
GEO-K-PHYTO
Détecter automatiquement vignes et vergers pour l'étude du lien entre cancer et exposition aux produits phytopharmaceutiques agricoles
Un modèle de détection IA a ici été entrainé à partir d’images aériennes en infrarouge couleur (BD ORTHO® infrarouge couleur à 20 centimètres) pour détecter automatiquement et systématiquement les vignes et vergers dans un certain nombre de départements puis générer des données géographiques exhaustives à l’échelle du territoire national.
Le projet GEO-K-PHYTO est porté par l’Institut Bergonié de Bordeaux et l’IGN. Il fait partie d’une action pilotée par les ministères chargés de la transition écologique, de l’agriculture, de la santé et de la recherche, avec l’appui financier de l’Office français de la biodiversité, par les crédits issus de la redevance pour pollutions diffuses attribués au plan Écophyto II+.
CarHab
Cartographier rapidement la végétation pour établir une carte nationale des habitats naturels et semi-naturels
CarHab est un programme multipartenarial qui vise à produire une cartographie nationale prédictive des habitats naturels et semi-naturels à l’échelle du 1:25 000e d’ici à 2026.
Pour produire la carte des physionomies de végétation, l’IGN met en œuvre un modèle IA de type Machine Learning. Celui-ci est entrainé à partir des jeux de données composés d’images satellitaires Sentinel-2 et de données sur la végétation que fournissent les conservatoires botaniques nationaux.
Le projet CarHab a été identifié par le ministère chargé de la transition écologique. Il doit contribuer aux rapportages auprès de l’Union européenne dans le cadre de la directive Habitats-Faune-Flore sur l’état des habitats naturels en France. Il entre dans le cadre de projets liés à l’amélioration de la connaissance de la biodiversité ou de l’aménagement du territoire.
SEG2SAT
Entrainer de nouveaux modèles à partir d'une IA générative d'images satellites
L’IA générative peut-elle contribuer au suivi du territoire et de ses évolutions ? C’est en tout cas l’une des nombreuses applications possibles du projet Seg2Sat, contraction de « Segmentation to Satellite ». Accessible en open source, Seg2Sat est un modèle de Machine Learning entraîné pour générer des images satellites réalistes ou stylisées en suivant l’exécution d’un prompt textuel et d’une segmentation définie : une image ou une couleur représentera, par exemple, un certain type de sol.
En se basant sur le modèle généraliste de génération d’image et très riche en styles qu’est « Stable Diffusion* », ce modèle permet de définir le style graphique (voire artistique !) souhaité pour chaque image qui sera générée.
Grâce à un réentraînement utilisant les jeux de données FLAIR produits par l’Institut, l’approche de génération d’image portée par Seg2Sat permet notamment de générer des jeux de données synthétiques pour entraîner d’autres modèles autour de la détection de changement.
*Développé par Stability AI
Gestion des risques
Programme LiDAR HD
Cartographier la France entière en 3D en un temps record
Grâce à un process automatique combinant les méthodes usuelles de classification, le croisement avec des bases de données existantes, et l’IA (algorithmes de Deep Learning utilisant des données d’apprentissage), les nuages de points 3D acquis dans le cadre du programme LiDAR HD sont classifiés en plusieurs classes (sol, eau, végétation, bâtiments, ponts, sursol pérenne). Les nuages de points donnent ensuite lieu à la production de modèles numériques (de terrain, de surface et de hauteur).
Les données LiDAR HD se révèlent essentielles pour la prévention du risque inondation, la connaissance de la ressource forestière, la transition énergétique et bien d’autres usages encore. Celles que diffuse l’IGN en opendata dans le cadre du programme de cartographie 3D France entière sont des nuages de points recalés, bruts ou classifiés, et des modélisations numériques 3D.
GOLIAT
Représenter le risque incendie en Corse
Ces cartes représentent le risque d’occurrence d’incendie par commune de Corse, pour la journée du 8 juillet 2009. Un risque de départ de feu allant de 0 (départ peu probable) à 1 (départ très probable) est associé à chaque commune. Les algorithmes de Machine Learning utilisés ont permis de faire un lien entre des données de natures très hétérogènes (météo, végétation, topologie, occupation des sols…) et le risque incendie, et ce de manière automatique.
Lancé en 2020, le projet GOLIAT (Groupement d’outils pour la lutte incendie et l’aménagement du territoire) vise à développer des prototypes d’outils de lutte incendie et d’aménagement du territoire par l’étude de données historiques de départs de feux afin de mieux cartographier et catégoriser les risques. Il est porté par l’université de Corse et financé par l’État et la Collectivité de Corse et a reçu le soutien de plusieurs partenaires.
Forêt
Kanop
Mesurer le stock de carbone contenu dans la biomasse végétale
Cette carte, produite par l’entreprise Kanop, met en évidence le stock de carbone contenu dans la biomasse végétale dans le nord de la Guyane française en 2023. Elle a été réalisée grâce à des technologies de Deep Learning à partir de données issues des satellites Sentinel-1, Sentinel-2, Landstat-8 et Alos-Palsar-2. Les zones stockant le plus de carbone sont représentées en rouge. Il s’agit le plus souvent de forêts primaires. Celles présentant une faible densité de carbone, en bleu, sont le plus souvent des zones exploitées à des fins agricoles.
Kanop développe une plateforme SaaS alimentée par l’intelligence artificielle pour fournir des analyses de données précises et à grande échelle en s’appuyant sur l’imagerie satellitaire, le radar et la technologie LiDAR. Cette approche permet de mesurer et de certifier les services écosystémiques rendus par les forêts, en quantifiant notamment leur capacité à séquestrer le carbone atmosphérique.
Accompagnée par 50 Partners Impact et CentraleSupélec, la start-up Kanop est hébergée à Station F (Paris). En tant que tiers de confiance, elle facilite la certification des projets de carbone et améliore la transparence du marché des crédits carbone.
Agriculture
Pixagri
Évaluer la biomasse des cultures intermédiaires
Développée par la société française TerraNIS spécialisée en données spatiales et télédétection, Pixagri est une plateforme de services d’agriculture de précision dédiée aux grandes cultures. Elle a pour objectif d’accompagner les exploitants, les coopératives agricoles et les négoces dans leur transition agroécologique.
Elle utilise le Deep Learning pour le suivi de la biomasse des cultures intermédiaires. L’algorithme développé par la société TerraNIS permet, à partir des mesures du satellite optique Sentinel-2, de calculer l’indice foliaire (Leaf Area Index). Un modèle donne ensuite accès à la biomasse des cultures intermédiaires.
Nimbo
Identifier les pratiques agricoles durables depuis l’espace
Un certain nombre de pratiques agricoles durables sont observables depuis l’espace. La solution Nimbo de l’entreprise Kermap produit de nombreux indicateurs de suivi de ces pratiques partout en Europe grâce à l’IA, dont l’identification des cultures, le suivi de la durée et du taux de couverture des sols, des haies bocagères, de l’irrigation… L’objectif ? Accompagner les acteurs de la filière dans le pilotage et la valorisation des pratiques durables mises en place par les agriculteurs.
Urbanisme
CoSIA
Analyser automatiquement la couverture des sols pour suivre leur artificialisation
À partir de ses données socles, l’IGN pilote la production du référentiel national d'occupation du sol à grande échelle (OCS GE). Au service de l’État et des collectivités, cette cartographie montre en détail l’occupation des sols selon plusieurs éléments clés pour en distinguer les zones imperméables, agricoles, forestières. Elle permet de quantifier et de qualifier l’évolution des territoires et leur artificialisation nette.
Depuis 2019, l’IGN emploie la télédétection d’objets (habitations, végétation, etc.) par IA pour accélérer la production et multiplier les usages. Des modèles obtenus par apprentissage profond analysent les images aériennes et extraient une première estimation de la couverture des sols. Ces cartes de « prédiction » de haute résolution (20 cm par pixel) sont diffusées sous le nom de CoSIA (Couverture du Sol par Intelligence Artificielle). Ces premiers résultats font ensuite l’objet de traitements complémentaires et de croisements avec des données existantes (données forestières, foncières ou relatives aux aides agricoles) pour produire la donnée finale utile à la mesure de l’artificialisation.
Hiatus
Géoréférencer automatiquement des images aériennes historiques
Pour géoréférencer une image, il faut des points d’appui, c’est-à-dire des points dont les coordonnées exactes sont connues. On dispose rarement de telles informations concernant les photographies aériennes anciennes. Le projet HIATUS (Historical Image Analysis for Territory Evolution Stories) est né de la volonté de localiser précisément des images anciennes pour retracer avec précision l’évolution des territoires, notamment en termes d’occupation des sols.
Sur ces deux orthophotographies de Provins, l’une en 1972 et l’autre en 2021. L’IA a identifié, rapidement et automatiquement, de nombreux points identiques entre les deux images. L’image actuelle étant géoréférencée, on connaît les coordonnées des points d’appui : on peut donc localiser l’image ancienne.
Le projet HIATUS a vu le jour grâce à la numérisation des prises de vues argentiques aériennes réalisées par l’IGN depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’aux années 2000 (soit plus de 3 millions de photographies). Il mobilise des algorithmes de traitement d’image, reposant pour certains sur des techniques d’IA qui permettent d’identifier automatiquement et rapidement des points communs entre une photographie ancienne et une orthophotographie récente et donc géoréférencée.
HIATUS est un projet de recherche partenarial financé par l’Agence nationale de la recherche et développé par l’IGN au sein de l’UMR LASTIG.
Simplu3D
Modéliser et simuler le développement urbain
SimPLU3D est un modèle qui permet de simuler des formes bâties 3D en tenant compte des contraintes morphologiques, telles que celles issues des plans locaux d’urbanisme (PLU). Cette approche sert la modélisation de l’impact des réglementations locales sur le développement urbain et de répondre à des questions cruciales sur la densité de construction, l’évolution des quartiers et les risques de construction nuisant à l’environnement. Pour explorer ce modèle, les équipes de recherche de l’IGN travaillent avec l’équipe OpenMOLE de l’Institut des systèmes complexes (ISC-PIF).
Cette collaboration porte aussi sur ArtiScales, un couplage de modèles grâce auquel on peut simuler des développements résidentiels sur plusieurs échelles.
L’IA est ici mise à contribution pour automatiser et optimiser les processus d’intégration et de simulation car elle offre une analyse plus rapide et précise des impacts des réglementations urbaines sur le développement résidentiel. Elle peut aussi aider à identifier des solutions efficaces en matière d’aménagement urbain.
Énergie
Nam’r
Révéler le potentiel énergétique des logements
Grâce à un modèle de données unique développé par la société Nam’r, il est désormais possible de visualiser les potentialités d’un logement en termes d’énergies renouvelables, de rénovation énergétique, d’adaptation aux risques climatiques.
NamR s’appuie sur les techniques d’IA que sont le Machine Learning, le Deep Learning ou le Computer Vision pour modéliser un ensemble de données inédites sur les logements recueillies auprès de centaines de milliers de sources recueillies, par exemple, auprès de l’IGN, des régions ou encore de l’ADEME. Les données sont ensuite complétées et enrichies par les prédictions des algorithmes.
Cette solution permet ainsi aux institutions publiques, aux assureurs, aux banques et à tous ceux qui accompagnent la transformation de l’habitat, de connaître le potentiel des logements et d’accompagner l’action avec des propositions personnalisées à l’adresse.
Mis à jour 21/11/2024